15 mai 2013

Francis Scott Fitzgerald, des bouquins et des films


  C’est avec la sortie en salle de Gatsby le Magnifique réalisé par mon âme sœur cinématographique Baz Luhrmann que j’ai décidé de vous parler un peu de cet auteur avant de me concentrer sur le film en lui-même.

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  Je tiens avant tout à vous préciser que je ne suis absolument pas une grande connaisseuse de son travail, ne l’ayant que récemment découvert et donc en ayant très peu lu — bien sûr, je le connaissais ainsi que ses œuvres de nom, n’étant pas enclin à le lire, ayant du mal avec les auteurs du XXème siècle et au-delà —, mais je suis tombée sous son charme.
  Je vais donc vous enjoindre à consulter sa petite fiche wikipedia, ne servant à rien que j'écrive des lignes et des lignes sur sa vie, qui est pourtant très intéressante — mais que vous trouverez ailleurs. Je vais plutôt m’attaquer à ce que j’ai pu en lire.


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  Gatsby le Magnifique (1925)

  Il s’agit probablement de son œuvre la plus populaire avec Les heureux et les damnés (voir L'Etrange Histoire de Benjamin Button, grâce au film de David Fincher, qui ne respecte par ailleurs que peu la nouvelle). Il est bon de noter qu'à sa sortie, et jusque dans les années 1950, ce roman n'a pas rencontré le succès. Il a d'ailleurs été retiré des librairies dès l'année de sa sortie par manque de lecteurs. Le climat de l'époque en est très certainement la raison : la Grande Dépression de 1929 et la Seconde Guerre mondiale ne doivent pas rendre propice la lecture d'une telle œuvre sur les ravages de l'argent et la décadence d'une période faste, surnommée "années folles".
  Pour l'histoire, elle nous présente, à travers le regard d’un jeune homme (Nick) parti du Middle West pour rejoindre New York, une vie décadente dans une Amérique des années de la prohibition où les fortunes se font aussi rapidement que les vies flambent. Ainsi, nous nous trouvons en présence de personnages énigmatiques dont Gatsby en est le représentent le plus fascinant (par son environnement et sa richesse nouvellement acquise qui reste une énigme pour tous). Tous ont leur part de secret et il est facile de pouvoir s’y identifier ou de ressentir de l’empathie tout du moins, ce qui les rend attachant et qui fait que la lecture de ce roman est prenante.
  Quoi qu’il en soit, chacun se retrouve à un moment ou à un autre perdu, bien que le protagoniste semble plus solide, comme pour nous ancrer à une relative stabilité. Ainsi, tous thèmes y sont abordés : amour, adultère, argent, quête de reconnaissance, mort... soulevant des question que tout le monde se pose (ou est susceptible de se poser), somme toute.
★★★★

  ✒Une vie parfaite (1928) et L’accordeur (1925)

  Ces œuvres se retrouvent au sein d’un même recueil de nouvelles.

  La première est une quête identitaire à travers le personnage de Basil, un lycéen qui choisi le fait de vouloir être un modèle de vertu en renonçant aux "vices" touchant sa génération que sont l'alcool, le tabagisme et les relations charnelles, voir les flirts de manière générale. Bien que courte, la lecture de cette nouvelle peu être laborieuse à l'image de ce personnage qui sonne comme faux (son revirement de choix de vie étant soudain, poussé par un ancien élève) et qui est agaçant car trop moralisateur pour son jeune âge, comme s'il avait déjà tout vu et tout vécu. Mais c'est en ce dernier point que la nouvelle a son intérêt, puisque c'est bien le but : montrer qu'une vie parfaite ne peut exister; et que même le plus fervent moralisateur n'en reste pas moins homme et peut donc craquer, que ce soit pour servir ses intérêts ou céder à une envie; nous en venons donc à nous demander "tout ça pour ça ?" eh oui, mais l'idée réside dans cette interrogation.

  La deuxième, quant à elle, nous narre la vie d'une jeune femme, Luella, à qui la vie sourit. Elle dispose de tout ce qu'elle a toujours voulu : un mari riche, une bonne situation et des jours paisibles. Mais trop paisibles à son goût. Comme dans Gatsby le Magnifique, nous voyons que l'argent n'achète pas tout, ne peut pas tout et n'est donc pas un but en soit. Ses occupations l'ennuie et elle se sent piéger dans sa condition de femme, n'aimant pas s'occuper des tâches de la maison, ni de son propre enfant; nous voyons là une certaine libération de la femme qui se veut autre chose qu'une simple maîtresse de maison. Notre héroïne pense donc à partir, tout laisser derrière elle; c'était sans compter quelques tours dont seule la vie a le secret.

Une vie parfaite
★★★☆☆
L'accordeur
★★★★☆

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  Gatsby le Magnifique, les films. Parce que, bien entendu, une œuvre de cet acabit a fait preuve de nombreuses adaptations, durant des périodes très diverses.

(De haut en bas et de gauche à droite : Warner Baxter, Alan Ladd, Robert Redford et Leonardo DiCaprio)

  ✒L’original (perdu) de Herbert Brenon (1926)


  Malheureusement, aucune copie de cette première version n'a pu être retrouvée et le film a donc été considéré comme perdu. Malheureusement car il aurait vraiment été intéressant d'avoir cette vision, contemporaine du roman (le film étant sorti dans l'année qui a suivi sa publication). Toutefois, le trailer existe toujours lui, que je vous propose en lien, n'arrivant pas à l'intégrer pour x raison dans le corps de l'article => ⦿


  ✒Le Prix du silence d’Elliott Nugent (1949)



  Nous sommes directement plongé dans l'histoire, après un rappel du contexte de l'époque : l'Amérique de la prohibition. De fait, nous nous doutons que le film va s'orienter sur cet aspect plus que d'autres développés dans le roman. Aussi, nous pouvons regretter ce parti pris qui a gommé des pages et des pages de Fitzgerald et crée, en quelque sorte, une histoire parallèle, celle que chacun s'imagine sur le passé de Gatsby ou concernant ses activités et sa personnalité en-dehors de son cercle d'intimes.
  Nous avons donc face à nous un Gatsby plus féroce, moins subtile dans sa manière d'agir; beaucoup plus volontaire. Et il en va de même pour tous les protagonistes qui ont l'air moins perdus, moins rêveurs, à l'image de la scène où Gatsby, faisant visiter sa maison à Daisy, lui fait étale de sa garde-robe et est sensé faire voler toutes ses chemises dans un déluge de couleurs et d'insouciance juvénile : dans ce film, il les pose simplement sur son lit et Daisy s'en trouve donc moins enchantée. L'opulence y est toujours présente, mais comme banalisée par ce Gatsby obtenant tout ce qu'il désire d'un claquement de doigts, renvoyant à cette époque particulière où les fortunes se font si rapidement.
  Le film se concentre moins sur les histoires d'amour désespérées (le côté obsessionnel de Gatsby pour Daisy étant quelque peu fade et l'aventure entre Tom et Myrtle étant inexistante) pour ne garder que ce côté... en fait, je n'ai pas compris ce que le film cherchait à montrer. Comme la moitié du roman est exposé en trente minutes et que Nick, qui est pourtant notre narrateur, est quasiment absent de présence scénaristique, il ne reste rien d'intéressant et on aurait pu penser à une histoire de gangsters puisque les allusions aux speakeasy, bootlegger et autres sont fréquentes mais même cet aspect reste fade et ne dépasse pas le cadre d'un dialogue.
  En bref, ce film n'est pas une adaption du roman de Fitzgerald mais en est inspiré pour créer une histoire vide de substance, sans mystère, sans réflexion, sans but apparent.
★☆☆☆☆

  ✒Jay Clayton à la réalisation et Francis Ford Coppola au scénario il y a 40 ans de cela (1974)



  Avant tout, cette version a remporté trois BAFTA lors de la 28ème cérémonie en 1975, et je dois dire qu'ils sont mérités : meilleure photographie, meilleurs décors et meilleurs costumes (qui sont très réussis). Ensuite, je pense qu'il est inutile de le mentionner, vous serez sans aucun doute possible d'accord avec moi, mais le choix de Robert Redford dans le rôle titre était d'une évidence folle ! qui d'autre que lui porte mieux le costume ? Il représente à merveille le charme fascinant de Jay Gatsby.
  Maintenant que ces quelques faits ont été exposés, nous pouvons nous attaquer au film en lui-même. Celui-ci s'ouvre sur la demeure de Gatsby, vide, avec en fond sonore la décadence des fêtes que le jeune homme a donné tout au long de l'été. Il s'agit en fait d'un écho à la fin de Gatsby. La richesse y est exposée (services frappés de son monogramme etc.), mais la demeure reste vide. Un luxe inutile somme toute. Ce thème de l'argent est bien sûr exposé tout au long du film, avec des alternances entre un luxe outrancier et une relative simplicité de vie d'autres protagonistes. Globalement, il y est dénoncé le chaos que provoque l'argent roi — comme il sera dit à la fin par Nick. L'argent a en effet causé la perte de Myrtle et séparé, des années plus tôt, Jay et Daisy.
  De plus, toujours dès l'ouverture du film, nous voyons l'obsession qu'entretient Gatsby pour Daisy, avec la multitude de photo qui se trouvent dans la bâtisse. Le héros se trouve bloqué dans le passé, ce qui est décrié au cours de l'histoire. Il s'agit de profiter de la vie et de ne pas avoir de regrets; à ce sujet, plusieurs personnages apportent leur pierre à l'édifice : "On ne vit qu'une fois" (Myrtle), "On ne remonte pas le temps" (Nick), "Je ne peux pas changer le passé" (Daisy), "Il ne savait pas que son rêve était déjà derrière lui" (Nick). La période se prête à profiter de la vie, dans des temps troubles (sortie de guerre, prohibition), ce qui ressort à travers la frénésie des plans et des danses qui sont nombreuses. Face à cela, tout comme dans le roman, Nick se trouve être notre attache pour que nous, spectateurs, ne nous perdions pas et ne nous fassions pas avoir (par cette argent et cette frénésie illusoire, occupant des personnes perdues); cet effet est présent par le choix de la narration permanente tout au long du film, qui nous permet de réfléchir quelques instants.
  Au final, bien que quelques scènes passent trop rapidement ou d'autres s'éternisant (mais ce sont des choix personnels après lecture du roman), il s'agit là d'une bonne adaptation.
★★★★☆

  ✒La vision de Baz Luhrmann (2013)



  Comme dit au début de l'article, Baz Luhrmann est vraiment mon âme sœur cinématographique. A l'image d'un Michel Gondry, on reconnaît immédiatement son œuvre, son univers. Ses films sont si élaborés qu'il n'en sort que très peu et je me retrouve régulièrement en manque de ce génie ! Alors mettez-moi un univers qui m'enchante, dans l'une des périodes les plus magiques de l'Histoire avec un Leonardo DiCaprio (qui bat presque Robert Redford en costume) et me voilà enchantée !
  La première partie du film est donc très rythmée, dans le pur style du réalisateur, avec des plans frénétiques et exaltés au son du musique qui fait des ravages par sa merveille. La deuxième partie, quant à elle, peine un peu, la magie retombe quelque peu, tout ralentis à mesure que Gatsby approche de son but. Logique donc mais cela peut paraître longuet et légèrement trop "gnangnan" entre Jay et Daisy; on aurait pu s'attendre à plus de relief.
  En tout cas, le film suit fidèlement le roman, aucun soucis là-dessus, l'importance de la lumière verte que vois Gatsby depuis sa demeure est notre fil conducteur et n'a pas été autant exploitée dans les autres film, ce qui donne une touche mystérieuse et fascinante, à l'image de l'obsession du héros pour Daisy. Concernant ce dernier, nous voyons tout à fait ses deux personnalités, à la fois brut de ses origines et douce de sa nouvelle vie et de son amour. Le rapport à l'argent y est très bien traité, la différence entre les deux mondes (personnes modestes vs. riches) est très claire et explique ces amours perturbées et la fuite du temps, l'enfermement de Gatsby dans une époque révolue est tout aussi claire que celle du film de Clayton, à l'image de ce dialogue entre les deux amis : "-On ne revit pas le passé. -Bien sûr que si.", renvoyant à toute la douce folie que contient chaque personnage. Enfin, notre ancre qu'est Nick prend toute sa place de narrateur par le choix de Luhrmann d'en faire un écrivain racontant l'histoire de cet homme mystérieux, ce qui n'est pas sans rappeler Moulin Rouge.
  En bref, un très bon film surpassant de peu sa précédente version. A titre personnel, j'aurais apprécié plus de folie chez Daisy et un rythme plus pesant dans la dernière partie, mais une mention spéciale pour les costumes qui sont somptueux et une mise en scène excellente.
★★★★☆

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  J'espère vous avoir aiguillé avec ce petit panorama et surtout vous avoir rendu curieux sur cet auteur qui vaut réellement le détour — moi-même voulant lire son œuvre complète à présent !

  N'hésitez pas à nous donner votre avis, que ce soit sur l'auteur en lui-même, un de ses livres mais également sur les films. Ceci fut un petit portrait, je ne pouvais pas trop m'étaler sur un article donc n'hésitez pas à pointer d'autres aspects qui vous semblent importants ou intéressants; après tout, nous sommes là pour ça.

— xoxo